Cette lettrine a pour base un texte de Carole Zalberg. Cet extrait de Nous vives souligne le côté brutal des conflits qui se passent sur le corps des femmes dans des régions où l’extrémisme religieux impose ses règles. On retrouve aussi dans ce texte le sentiment d’abandon que ressentent les victimes face à leurs appels à l’aide auxquels personne ne répond jamais. Ainsi dans la composition de la lettrine, je voulais avoir un côté dur et acéré qui tient en place la lettrine. Derrière l’aspect agressif, j’ai décidé de retrouver une composition plus molle et qui a l’air de se décomposer, qui tombe au fil du texte. Les deux autres lettrines se décomposent et s’effacent petit à petit.

Ce workshop m’a permis d’explorer un peu plus la lettre et l’ornement de cette lettre. J’ai pu penser à la lettre en terme de visuel plus qu’en terme de courbes respectant des règles précises. L’alphagraph propose des expérimentations d’autant plus intéressantes qu’on a pu les découper au laser par la suite et créer des tampons. La confrontation entre le tampon encré et imprimé et le visuel numérique propose un rendu plus vivant et moins froid de la lettre composée dans Processing. Au début j’avais du mal à trouver des formes originales, je retombais souvent sur des compositions similaires au sein de la lettre, puis au fur et à mesure j’ai pu découvrir des formes un peu plus originales grâce à cet outil.

Mon premier texte est extrait de l'Absence d'Oiseaux d'Eau, un roman qui retrace la correspondance épistolaire d’un couple. Leur relation étant terminée, seules les lettres de la femme - Emmanuelle Pagano - sont retranscrites. La lettre est composée d’un foisonnement de métaphores autour de la nature. J’ai donc choisi de traiter la lettrine en défonce d’une illustration afin de la faire apparaître de manière plus ou moins discernable dans le paysage. J’ai utilisé le tampon sans encre pour créer un relief sur la lettre et lui permettre d’être soulignée par un effet d’ombre.

Mon second texte est un extrait de Vers le Nord de Nicole Caligaris. Elle décrit ses recherches pour retrouver l’auteur d’un tableau à la facture pointilliste qu’elle a hérité de son maître. L’auteur présumé est un personnage mystérieux, qui semble un peu fou et qui a séjourné dans une prison. J’ai repris l’idée de synthèse additive avec l’impression en riso : plusieurs trames de points de différentes couleurs se superposent pour créer de nouvelles nuances. Par dessus vient s’apposer l’impression au tampon pour évoquer les barreaux de la prison.

Alphagraph est un logiciel un peu compliqué à maîtriser car les mêmes formes ont tendance à revenir un peu trop souvent au début, mais une fois qu’on prend l’outil en main les possibilités se démultiplient. J’ai trouvé très intéressant le fait de devoir réfléchir en amont aux techniques d’impression, ce qui m’a poussée hors de mes habitudes, et d’avoir l’opportunité d’expérimenter le logiciel, la riso et la presse typographique. 

J’ai réalisé une lettrine pour un texte extrait de Portrait fictif d’une Dunkerquoise d’Ismaël Jude dans l’Humanité du 1er juillet 2015. Ce texte parle du Blanckaert, un immeuble de Dunkerque qui a été détruit et évoque la relation qu’on eu ses habitants avec ce lieu. Ainsi ma lettrine, un P, reprend les structures architecturales des barres d’immeubles en les superposant afin de recréer un effet de perspective.

Ce qui m’a intéressée dans ce workshop a été le fait d’être impliquée dans toute la chaîne de production d’un visuel, concevoir la matrice de sa lettrine sur Processing en ayant en tête les contraintes de réalisation du caractère pour la presse typo, pouvoir enrichir son visuel grâce à la riso et comprendre la logique des différentes techniques d’impression.

Ce texte, extrait de Un art poétiqu d'Arno Bertina, est engagé politiquement. De retour de Marseille, il raconte à la première personne les luttes syndicales auxquelles il vient d'assister et donne sa vision de la France et ses utopies. La mise en page et le dessin de la lettrine tentent de donner le ton militant et bruyant des événements tels qu'ils sont racontés. L'objet final a plus l'apparence d'un tract politique ou d'une affiche officielle ancienne que d'une page de livre.

L'Outil alphaGraph nous a fait découvrir une technique expérimentale du travail de la lettre ornée, tout en tenant compte de sa méthode de fabrication : la découpe laser sur bois et les contraintes que cela engendre. En plus de la conception d'une lettrine, chacun a cherché des techniques de mise en page exploitant les possibilités et les accidents de la risographie et de l'encre d'imprimerie afin d'illustrer son texte de façon personnelle.

Dans ce texte, il est question de Saint-Nazaire en 1917. Des ouvriers dans les chantiers navals, de la difficulté du travail, des tâches sur les vêtements et des poumons brûlés par l'eau froide. Au service de la grande guerre et de l'économie florissante. Assez rapidement, j'ai choisi de travailler sur une composition qui évoquerait cette atmosphère industrielle pesante. Le fond, traité en monotype, présente des effets de matières tortueux et sombres. Les lettrines, imposantes et très noires structurent le texte. Le H en initiale est rehaussé de stries cuivrées. Les couleurs ainsi que le contraste entre l'aspect aléatoire du monotype et la rigidité des capitales participent à rendre compte de cette ambiance portuaire.

Ce workshop nous a permis de suivre un processus très «complet» et d'aborder de nombreuses techniques d'impression. À celles que nous maîtrisions déjà, se sont ajoutées de nouvelles connaissances et cette expérience nous a également donné l'opportunité d'expérimenter beaucoup, à la fois grâce à la diversité des techniques convoquées (laser, risographie, matrices en bois…) et au programme alphaGraph à l'origine du projet. Celui-ci a particulièrement influencé ma manière d'aborder la typographie en y apportant une grande liberté, ce qui a eu pour effet de me décomplexer dans mon rapport à la lettre et m'a permis de tester de nombreuses possibilités avant d'arriver à ce résultat.

Le texte choisi est un extrait du livre L'Étrange Cas du docteur Jekyll et de M. Hyde de Robert L.Stevenson. J'ai voulu représenter la double personnalité du personnage de Docteur Jekyll et M. Hyde grâce à l'emploi de deux couleurs imprimées à la riso, qui, une fois superposées donnent un troisième caractère, celui du personnage schizophrène. J'ai également décider de caractériser la dualité du personnage par les pleins et les vides de la lettrine.

Le texte Blanche Lol Mabel et les autres de Gwenaëlle Aubry évoque à travers ces trois personnages une 
certaine condition de la femme. Une condition en apparence idéale dans laquelle elles jouent le rôle qu’on leur attribue. Mais derrière cette façade se cache un désarroi énorme plongeant ces femmes – qui répondent en permanence aux exigences de la société – au bord du précipice. Dans cette composition la lettrine joue le rôle de la prison dorée inspirée de cages à oiseaux d’époques. 
Les ornementations en images, elles, sont tirées de détails de scènes du film A Woman Under the Influence et de la pièce de théâtre A Streetcar Named Desire. L’ordre de passage des impressions (images en Riso, texte en laser puis impression des lettrines par dessus) vient finir de donner sens à la cohabitation de ces formes.

La complémentarité entre l’outil numérique « homemade » et le retour à une technique d’impression manuelle était particulièrement intéressante. Pendant le workshop, le rapport texte/image a pris le dessus sur l’expérimentation avec alphaGraph mais je pense continuer à exploiter les possibilités offertes par cet outil pour d’autres types de supports.

Mon premier texte est extrait de Huma, trop huma de Frédéric Ciriez, publié dans le journal L’Humanité. Dans ce texte, le journaliste fait le portrait d’un homme portant le nom Huma, de humanité. Cet homme, étonné de la démarche du journaliste, raconte son histoire. Etant né « dans un pneu », il explique avoir toujours été entouré de carcasses de voitures. Son quotidien, son monde tourne autour des pare-chocs abimés, des voitures cabossées, de la graisse de moteur. En imaginant l’univers de cet homme, j’ai choisi de travailler ma lettrine de la même manière. Le texte est abimé, comme s’il y avait des traces de pneus, de graisse. La lettre, elle, reflète le mouvement de la voiture, la vitesse.

Mon deuxième texte est extrait de Le fleuriste, de Célia Houdart, publié dans le journal L’Humanité. Dans ce texte, la journaliste fait le portrait d’une famille passionnée par les fleurs. Au travers de ce père et de sa fille, la journaliste décrit les gestes du fleuriste, ce qui l’anime tout au long de la journée. Baignant dans les fleurs, j’ai voulu que le texte reflète ce quotidien du fleuriste. Les fleurs, tout autour du texte, habille la page alors que la lettre se fond dans les feuillages des fleurs.

N’ayant jamais travaillé la lettre en tant que lettrine, j’ai trouvé très intéressant de voir les différentes propositions de lettres à partir d’un même logiciel. Au début, il était difficile de s’imaginer les possibilités du logiciel mais ce qui était intéressant était de le considérer comme un outil et non pas une contrainte de laquelle on ne peut s’échapper.

Ce texte expose une ascension maladive de violence du narrateur. Ce mal est le fruit de sa dépendance à l’alcool. Une sociopathie naissante s’empare du personnage. L’épisode extrait est celle dans laquelle il massacre son chat noir Pluton violemment avec une arme blanche et finit par l'amputer d’un œil.

Les motifs de fonds et la lettrine sont issus des expérimentations sur Alphagraph. La décoration est une représentation de la fourrure animale. Tandis que la lettrine superposée représente la mutilation subie par le chat.

Le workshop est une expérience fortement intéressante notamment pour employer des techniques d’impression et d’une machine, l’utilisation d’un logiciel sur « processing » qui m’étaient exclusifs. Ce que j’ai trouvé intéressant est l’idée du « live » de ce workshop durant les journées portes ouvertes.